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7 juillet 2012 6 07 /07 /juillet /2012 16:07
Ce que les économistes ne nous disent pas

Alors que la crise bat son plein et que les mesures imposées par les marchés seront à coup sûr entérinées d’ici à peu par des gouvernements serviles, la bataille fait rage pour savoir si elle seront suffisantes pour redonner aux différents acteurs économiques la confiance qui leur fait défaut, tout en réduisant le taux d’endettement des pays les plus fragiles, et cela sans (trop) nuire à la croissance.

Nombreux sont ceux qui naturellement s’opposent, parmi les peuples, aux différents mécanismes proposés par les dirigeants européens, tandis que tous les analystes politiques ou économiques semblent se faire à cette idée comme étant la seule option valable, du moins à court terme. Mais personne ne semble en mesure de proposer d’autres alternatives capables de faire coïncider les deux éléments contradictoires que sont l’effacement de la dette et le retour à la croissance, et encore moins de nous laisser entrevoir d’autres perspectives que l’austérité générale ou la mort de la démocratie. Car si on fait le tour du petit monde médiatico-économico-politique qui sévit sur la toile, il apparaît qu’en dehors des critiques ou des descriptions (parfois fort justes) de la situation il manque une sorte de « force » susceptible de voir plus loin que la simple critique des événements, sur le long terme. On connaît tous le vieil adage qui dit « gouverner c’est prévoir », mais force est de constater qu’à part prévoir l’adoption des mesures concernant le « paquet » européen, nul ne s’aventure pour nous dire ce qui se passera une fois ce plan de sauvetage adopté par l’Europe.

 

Et pourtant ne serait-il pas important de savoir ce qui se passera « après » l’adoption du mécanisme de stabilité et de croissance (MES), de la création du fonds de secours européen (FESF), et à terme du fédéralisme européen ?
Que se passera-t-il une fois les conditions de travail dégradées, les salaires baissés, les droits sociaux anéantis, et l’harmonisation fiscale et bancaire réalisées ? On nous parle aujourd’hui de sacrifices pour retrouver la compétitivité, mais si les peuples doivent y consentir, qui peut aujourd’hui leur dire ce qui se passera à moyen ou à long terme ?

Les banques referont-elles crédit ? Les salaires vont ils ré-augmenter ? Les conditions de travail vont-elles s’améliorer ? Le chômage va-t-il baisser ? Et les investissements reprendre, ou les impôts être réduits ?

Et combien de temps va-t-il durer, ce « temps des sacrifices », et puis surtout quels sacrifices et pour qui ?

Voilà ce que nous voudrions bien savoir, et voilà justement ce qu’on ne nous dit pas.

 

La seule chose que nous soyons en état de constater aujourd’hui, c’est que monsieur Hollande n’est pas de gauche, que l’affaire du Libor n’est pas un cas unique, que les riches continuent de s’enrichir, quel’Europe n’explosera pas et surtout que tous les hommes de pouvoir sont des menteurs, en plus d’être corrompus. Comment dans ce cas se sentir rassurés ?

 

Alors maintenant j’en appelle à tous les économistes et autres statisticiens chevronnés qui parlent si haut pour dénoncer les excès des « banksters » ou les illusions des utopistes : rassemblez-vous et réfléchissez bien, calculez et anticipez, faites autant de probabilités, de calculs de risques que vous le désirez, lisez les bilans des entreprises et relisez vos théories rationalisées, prenez les marges d’erreur qui vous conviennent et dites nous ce qui se passera après l’adoption du plan. Faites-nous savoir en quoi la baisse des salaires et le fameux « retour à la compétitivité » nous sera bénéfique à long terme, et comment nous nous relèverons après-demain plus forts que nous le sommes aujourd’hui. Ce que nous voudrions savoir, c’est ce que dit la théorie sur laquelle s’appuient les agences de notation, les analystes et autres météorologues de l’apocalypse… Que tous les savants prédicateurs qui s’expriment quotidiennement sur les « grands » médias nous décrivent leur plan par le menu, qu’ils aillent vraiment jusqu’au fond des choses et qu’ils nous fassent parvenir leurs résultats, qu’on voit de quoi il retourne.


Il faut de l’austérité, il faut baisser les salaires, licencier du personnel, réformer le code du travail pour sauver l’Europe d’accord, nous vous avons bien entendu… Mais et après ? Et après ?

Et puis quand bien même, si l’Europe parvenait à faire « repartir la croissance » au prix des sacrifices aujourd’hui exigés, que se passerait-il au niveau mondial ? Ceux qui voyaient leur situation s’améliorer, ceux qui espéraient gagner des parts de marchés à l’international, vont-ils devoir s’asseoir à nouveau sur leurs espoirs ?

Je mets au défi tous les économistes de la planète de nous prouver comment les mesures qu’ils soutiennent aujourd’hui favoriseront demain les conditions d’existence de plus d’êtres humains qu’hier. J’affirme par avance que cela est impossible, pour la simple et bonne raison que tout cela est incalculable, et que nous le savons tous. Vous pourrez prendre la chose de quelque côté qui vous convienne, le capitalisme favorisera toujours les uns au détriment des autres, et ce n’est certainement pas en se fourrant la tête dans le sable que nous trouverons le moyen de sortir de cette aberration.

La décadence d’une civilisation commence le jour où les hommes cessent de prévoir l’avenir pour tenter de sauvegarder un présent qui leur échappe. Car si au lieu de se pencher sur les moyens de sauvegarder un système qui a fait preuve de son inadaptation nos « penseurs » se mettaient à imaginer celui qui doit le remplacer, alors l’espoir pourrait renaître aussi rapidement qu’il a disparu.


 

Caleb Irri

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7 juillet 2012 6 07 /07 /juillet /2012 15:17

Elisabeth Guigou

Soulignant comme un aveu qu’« il faut démocratiser l’Europe », Élisabeth Guigou peut en effet se prévaloir d’être une grande démocrate depuis les deux épisodes de 2008 touchant à la ratification du traité de Lisbonne…

Lors du Congrès à Versailles le 4 février 2008, elle s’était abstenue pour trois jours plus tard votée en faveur du traité de Lisbonne à l’Assemblée nationale, piétinant ainsi la souveraineté du Peuple français exprimée le 29 mai 2005 par référendum.

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6 juillet 2012 5 06 /07 /juillet /2012 16:56

05 juillet 2012

by Slovar

Salariés et chômeurs seniors : Les mal aimés des entreprises !
Si les organisations patronales militent pour faire travailler plus longtemps les salariés seniors, la réalité de leurs conditions de travail est loin d'être évidente. La lecture du baromètre seniors en entreprise et édifiante à ce sujet.





Il y a encore quelques mois, François Fillon, sous les acclamations de Laurence Parisot, proposait de reporter l'âge de la retraite de 62 à ... 67 ans. Déjà, direz-vous, pour que les salariés atteignent 62 ans, il faudrait que les entreprises changent d'attitude à l'égard de plus âgés qui, lorsqu'ils ne se voient pas proposer une rupture conventionnelle déplorent, nous dit le 12e Baromètre Seniors en entreprise : « (...) leurs conditions de travail et l'inaction de leur employeur concernant leur gestion de carrière (...) »
La lecture du Baromètre Seniors en entreprise, qui vient d'être publié par le magazine Notre Temps, apporte un parfait démenti aux propos tenus par le précédent gouvernement et les organisations patronales. En effet, loin des images d'Epinal, de la longévité heureuse des plus âgés au travail, on découvre que toutes les mesures présentées pour justifier le report de l'âge de la retraite ne sont au mieux que des postures, au pire des impostures !
Que dit le baromètre ? Extraits
Conditions de travail
« (...) Les seniors sont plutôt insatisfaits de leurs conditions de travail et notamment de l'inaction de leur employeur concernant leur gestion de carrière (...) Côté salaire, 78% des séniors interrogés affirment n'avoir reçu aucune augmentation individuelle depuis trois ans. 85% déplorent également le manque de promotion, de changement de poste ou d'affectation sur un nouveau projet ces trois dernières années. Ils ne sont globalement pas très confiants puisque 82% ne pensent pas pouvoir donner une nouvelle direction à leur carrière. Plus alarmant : 42% des sondés ont le sentiment qu'eux-mêmes ou les seniors en général sont victimes de harcèlement du fait de leur âge (contre 40% non). Un chiffre en augmentation puisqu'ils étaient 36% en 2010 et 2011 (...) »
La retraite
« (...) Si la plupart des sondés souhaiteraient dans l'idéal, prendre leur retraite à 60 ans ou voire moins, un quart ne savent pas à quel âge ils devront travailler pour obtenir leur retraite à taux plein. Mal informés, la plupart des répondants (81%) n'ont eu aucun bilan, rendez-vous de carrière ou aide à l'orientation au cours des trois dernières années et 78% disent ne pas avoir bénéficié d'une information sur la retraite ou bilan retraite sur cette même période (...) »
Etonnant, écrit le blog Mode d'Emploi, puisque : « (...) le précédent gouvernement avait rendu obligatoire l'entretien de seconde partie de carrière par la Loi sur l'orientation et la formation de novembre 2009... (...) »
Le tutorat outil de maintien dans l'emploi
« (...) 56% d'entre eux pensent que le contrat de génération proposé par le gouvernement Hollande, basé sur le principe un jeune de moins de 30 ans embauché, un senior de plus de 55 ans maintenu dans son emploi pour le tutorer, peut constituer une vraie solution pour le maintien dans l'emploi des séniors (...) 76% des seniors regrettent que leur entreprise n'ait mis en place aucun dispositif de tutorat pour leur permettre de transmettre leurs compétences (...) »
A cela nous ajouterons la gadgeterie communicatrice, du précédent quinquennat : campagne d'information gouvernementale sur les TMS lancée en fanfare par Eric Woerth : « Mettre fin aux troubles musculo-squelettiques dans votre entreprise, c’est possible », ou l'opération : « Bonnes pratiques seniors » lancée par Xavier Bertrand et Laurent Wauquiez qui consistait à proposer aux entreprises de se faire auditer par Vigéo sur : « (...) les processus de gestion des ressources humaines les plus exposés au risque de discrimination : recrutement, formation, santé au travail (...) »
Pas brillant direz-vous ? Et encore, pourrait-on dire, les seniors interrogés sont encore dans l'emploi.
Mais qu'advient-il de ceux qui sont au chômage, dont la majorité de longue durée ? Il est bon de relire ce témoignage de Sylvain Grevedon, spécialiste de l’emploi des seniors au Cabinet Mercuri Urval, qui expliquait que pour les seniors : « Retrouver un CDI est quasi impossible » et ajoutait : « (...) on commence à être considéré comme un salarié trop âgé à 52 ans (...) leur taux de chômage a explosé ces dernières années et le marché de l’emploi leur reste toujours aussi hostile (...) Les experts s’accordent à dire que les employeurs ont privilégié le maintien dans l’emploi de leurs salariés au détriment du recrutement de nouveaux seniors (...) Si le nombre de demandeurs d’emploi a progressé de 5,6% en 2011, celui des plus de 50 ans a explosé de 15,5%. Ils sont désormais 872.000 à être inscrits à Pôle emploi (...) »
Face à un telle situation, nombreux sont ceux qui se tournent vers les pouvoirs publics, leur demandant de mettre en place des dispositifs d'aides financières ou de formation pour les seniors. Le contrat de génération même s'il n'est pas parfait est une ébauche de solution. Du moins pour ceux encore dans l'emploi.
Pour les autres, les aides ou formations ne représentent au mieux que des effets d'aubaines pour les entreprises, au pire ne servent à rien puisqu'aucune embauche ne leur sera proposée à terme !
La question de l'emploi des plus âgés est plutôt à poser aux organisations patronales qui continuent de prôner l'allongement sans fin de l'âge légal de la retraite, mais continuent à abuser de la rupture conventionnelle pour se débarrasser d'eux tout en évitant de les recruter, une fois au chômage.
Bien que ces organisations patronales qui seront présentes lors de la conférence sociale des 9 et 10 juillet n'auront que les mots compétitivité et flexibilité à la bouche, il serait intéressant que quelqu'un veuille bien les mettre devant leurs responsabilités en ce qui concerne l'emploi des seniors.
Car, il est vraiment temps de rappeler à Laurence Parisot qui nous expliquait en 2008 : « (...) Pour favoriser l'emploi des seniors, il faut repousser l'âge légal de la retraite (...) les pays ayant les plus forts taux d'activité des seniors sont ceux où l'âge de la retraite est le plus élevé (...) » où à Jean-François Roubaud de la CGPME qui déclarait : « il va falloir travailler plus longtemps » que les salariés et chômeurs seniors qui sont partant pour continuer à travailler dans de bonnes conditions, sont toujours en attente des résultats de leur propos et démonstrations !

04 juillet 2012

Licenciements : Le Medef invente la rupture conventionnelle ... collective !
L'UMP porteuse de ses demandes étant occupée à régler ses comptes, le Medef passe à l'attaque. Il réclame l'application de la TVA sociale et l'extension de la rupture conventionnelle ... sur le plan collectif !




Laurence Parisot n'avait pas fait mystère de son choix politique lors de l'élection présidentielle. Or, la défaite de son champion a anéanti 5 années de lobbying, qui devaient aboutir à la précarisation généralisée des salariés.A quelques jours de la Grande conférence sociale des 9 et 10 juillet, elle vient de dévoiler ses propositions qu'on pourrait résumer par : Faire payer aux seuls salariés le retour de la compétitivité.
L'éternel retour de la TVA sociale !
Le Medef remet sur la table l'un de ses scénarios présenté en novembre 2011, qui consistait à tranférer certaines cotisations sociales vers l'impôt. Celui qui a été retenu est l'hypothèse la plus basse, c'est à dire 30 milliards.
Selon Laurence Parisot, cela correspondrait à : « (...) 3,5 points du côté employeur et un point et demi côté salarié (...) » Le Medef avait calculé, en janvier 2012, que le gain de pouvoir d'achat des salariés issue de la baisse de leurs propres cotisations sociales, se traduirait par : « environ 15 euros net pour 2.000 euros de salaire brut »
Et dans la mesure où ce sont les mêmes salariés qui payeront la baisse des cotisations patronales par une augmentation de la TVA, vous dire si le gain serait important !
La compétitivité par la précarisation globale des salariés !
Certainement par pudeur, le Medef n'utilise jamais le mot de précarisation. Il lui préfère les termes de « réforme du marché du travail » et de « flexibilité » Et dans le domaine notre amie Laurence est une artiste. Persuadée que convaincre le nouveau gouvernement n'est qu'une question de temps : « Je n'exclus pas que ce qui n'est pas envisagé aujourd'hui soit finalement mieux compris et accepté demain » Elle revient à la charge avec le concept de la flexisécurité, qui consiste à pouvoir se séparer à moindre coût des salariés, pour mieux les confier à l'état, qui aurait la charge de les recycler, pour un éventuel futur usage.
Et Laurence Parisot de dégainer une nouveauté : « En 2008, nous avons fait un grand pas en matière de flexi-sécurité avec l'invention de la rupture conventionnelle (...) Il faut inventer quelque chose d'équivalent sur le plan collectif, c'est-à-dire dans l'hypothèse où une entreprise doit faire des ajustements d'effectifs ou des restructurations (...) »
Outre qu'il est permis de sourire sur le fait que rupture conventionnelle soit synonyme de flexibilité, puisqu'il s'agit de se séparer des salariés sans avoir à à trouver de motif, on notera surtout, que celle-ci a permis de mettre en « pré retraite », nombre de salariés âgés sur le compte de l'UNEDIC. Quant aux autres salariés, à part fréquenter les locaux de Pôle Emploi, ils se demandent toujours ce que leur a apporté la flexisécurité !
Rappelons, pour la forme, que Laurence Parisot affirmait avec enthousiasme : « Ce concept de séparabilité représente un acquis majeur pour tous. C'est une vraie bonne nouvelle pour l'embauche en France qui ainsi se modernise et se dynamise. Il marque aussi un progrès souhaitable vers l'égalité entre l'employeur et l'employé » Ce qui s'est traduit par le nombre de 600 000 ruptures homologués depuis la mise en place du dispositif et représentent désormais 11% des motifs de rupture de CDI !
Mais peu importe, puisque, ce que cherche Laurence Parisot au travers de cette « rupture conventionnelle collective » c'est surtout de plus avoir à assumer les obligations légales des entreprises en cas de plans de sauvegarde de l'emploi (plans sociaux). C'est à dire : l'accompagnement des salariés en cas de licenciement économique. En clair, fin du casse tête pour les DRH qui n'auraient plus qu'à envoyer les lettres de licenciement aux salariés, et surtout, une très belle économie pour les entreprises et leurs actionnaires !
En quelque sorte, l'application ultime de la célèbre phrase de Laurence Parisot : « La vie, la santé, l'amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? »
Ajoutons à cette lumineuse idée la demande d'application des accords compétitivité-emploi qui permettraient aux entreprises : « (...) confrontées à des difficultés économiques d'ajuster leurs effectifs, leur masse salariale et la durée du travail (...) » Laurence Parisot assurant que des organisations syndicales (en réalité la seule CFDT) commencent à les regarder d'un oeil moins hostile. Et vous obtenez la plus grande vague de licenciements et de précarité salariale jamais connue dans notre pays !
Voilà donc, en résumé, la vision de la compétitivité, que Laurence Parisot défendra, lors de la conférence sociale des 9 et 10 juillet. A moins qu'elle n'ait gardé sous pied quelques autres idées ... toutes aussi généreuses ...
Crédit et copyright image

03 juillet 2012

La Commission européenne a un problème avec le pouvoir d'achat ?
Les Etats peuvent augmenter la TVA à l'infini sans déranger la Commission européenne. Par contre lorsqu'un gouvernement décide de la baisser, Bruxelles sort de ses gonds, au nom de ... la concurrence !




Une baisse de la TVA est toujours une bonne chose pour les consommateurs. On se souvient en effet des résultats de la baisse sur les travaux destinée à permettre l'amélioration du parc des logements existants qui avait dopé la demande des particuliers.Néanmoins, la Commission Européenne n'aime pas les baisses qui selon elle pourrait mettre en péril la concurrence !
Ainsi, alors que la France et le Luxembourg viennent de décider d'appliquer un taux réduit de TVA aux livres numériques, la Commission Européenne vient de leur adresser une lettre de mise en demeure.
A quel titre ?
Hé bien : « (...) La législation de l'UE ne permet pas aux Etats membres d'appliquer un taux réduit aux livres numériques (...) expliquant qu'on pourrait donc être en présence d'une violation claire des règles communautaires (...) »
Vioation ?
Il faut savoir nous dit la Commission que : « (...) par ce biais ils ont pu attirer chez eux certaines activités de vente de livres numériques (...) La Commission aurait : (...) reçu des plaintes de plusieurs ministres des Finances, notamment du Royaume-Uni, de Pologne et des Pays-Bas, qui ont déjà relevé l'effet négatif sur les ventes de livres sur leur marché domestique (...) Selon la Commission, le taux appliqué par le Luxembourg est directement à l'origine d'une chute des ventes de 4,5 millions d'unités au seul Royaume-Uni en janvier et février, soit 30 millions de livres sterling (37,3 millions d'euros) »
Ce discours est tellement surréaliste que Neelie Kroes, elle même Commissaire Européen a déclaré : « Est-ce que des taux différents de TVA entre les livres numériques et papier ont un sens au XXIe siècle »
Même si la Commission reconnaît étudier de près le sujet, et qu'elle pourrait revoir sa décision en 2013, elle campe sur ses postions : « (...) nous prenons au sérieux notre mission de gardien des traités (...) »
Voilà donc pourquoi, vous risquez, si vous achetez des livres numériques, de contineur à les payer plus chers !
Mais que vaut le pouvoir d'achat de quelques consommateurs à côté de l'orthodoxie de la concurrence de la Commission Européenne ?

Alors qu'elle est en pleine crise financière, l'Europe subirait une évasion fiscale annuelle de 1.000 milliards d’euros, sans compter son économie noire. Qu'attendent les chefs d'état et de gouvernement à la recherche de recettes ?



Dans toute l'Europe, on ne fait que parler de coupes budgétaires et de mesures d'économies drastiques. La dernière mode étant à la liquidation du moindre acquis social et du droit du travail. Hé oui, nous répète t-on les caisses des états sont vides !
Or, à la lecture d'un petit article de L'Express.be daté du 29 juin, on s'aperçoit que de l'argent, il y en a beaucoup. La seule condition pour le trouver étant de s'intéresser aux paradis fiscaux européens et à leurs clients qui eux se portent à merveille !
Que nous apprenent-ils ?
« La Commission Européenne vient d’épingler plusieurs pays européens dans un rapport dans lequel elle les accuse d’avoir permis une évasion fiscale de l’ordre du millier de milliards d’euros, le double des 5 plans de sauvetage additionnés (492,5 milliards d’euros), et même, dans certains cas, de s’opposer à la mise en place de législations pour lutter contre les paradis fiscaux.

Le rapport met ainsi en cause la Bulgarie, Chypre, ainsi que la Grèce, pour l’importance de leurs économies souterraines, respectivement 30%, 26% et 24% de leur PIB. Chypre a été très critiquée pour ne pas avoir implémenté de façon adéquate la législation européenne existante. Au total, la valeur de l’économie noire est estimée à 2.000 milliards d’euros en Europe (...) »
Rappelons à ceux qui l'ignoreraient que Chypre s'apprête à prendre la présidence semestrielle de l'UE et à fait appel à l'Union européenne pour son secteur bancaire en difficultés. Et même si le directeur du Réseau pour la justice fiscale concède que : « En termes d'échelle, c'est un acteur insignifiant dans le secteur des services financiers offshore (...) à côté des monuments européens : « (...) c'est une niche pour les flux illicites entre les ex-pays de l'Union soviétique » Les monuments européens étant : Londres, Luxembourg ou Zurich !
Quelques chiffres qui en disent long !
Ainsi, Algirdas Šemeta, le commissaire européen à la Fiscalité et à l’Union Douanière, indique que : « (...) 35% des dépôts non bancaires des pays de l’UE sont détenus par des sociétés-écran à l’étranger, dont 20%, soit 1.400 milliards d’euros seraient placés en Suisse et aux Iles Caïman, un territoire britannique ». Algirdas Šemeta n'oublie pas dans sa liste l'île de Jersey qui s'impose de plus en plus en plus : « (...) comme paradis fiscal et centre de placement non bancaire (...) »
Il semble que les britanniques eux même commencent à être excédés par la facilité avec laquelle cerains contribuables pratiquent l'évasion fiscale. En effet, cette évasion représente 5,6 milliards d'euros par an !
Jersey est dans le collimateur des autorités britanniques, qui ont de plus en plus de mal à justifier une rigueur accrue à la population, alors que des particuliers et des entreprises profitent du statut de paradis fiscal pour échapper au fisc.
Pour la petite histoire, sachez que le ministre-adjoint au premier ministre de l'île de Jersey a menacé la couronne britannique ... de devenir indépendante du Royaume-Uni. Mais pas l'Union européenne à laquelle elle est est associée !
Alors, on fait quoi ?
Face à cette situation, la Commission européenne devrait : « (...) s'atteler à donner forme aux idées exposées (...) Avant la fin de l'année, elle présentera un plan d’action pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, contenant des mesures spécifiques qui pourraient être mises en place rapidement. Parallèlement, la Commission présentera également son initiative sur les paradis fiscaux et la planification fiscale agressive (...) »
Autrement dit, vu le temps nécessaire à à la Commission pour présenter son plan d'action et, celui que l'ensemble des pays adhérents à l'union européenne mettra pour se mettre d'accord, il est assez vraissemblable que l'évasion fiscale a encore de longs et beaux jours devant elle.
Pendant ce temps là, les gouvernements continueront d'appliquer à leurs populations toujours plus de coupes budgétaires et de mesures d'économies dratiques !

Slovar
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6 juillet 2012 5 06 /07 /juillet /2012 09:44
Un gestionnaire de fortune a peur d'être tondu par Hollande


Rédigé par Juan Sarkofrance le Vendredi 6 Juillet 2012


Un cabinet de gestion de fortune s'est offert une pleine page publicitaire dans le Monde du 5 juillet pour dénoncer la « tonte fiscale » à laquelle la France serait soumise par François Hollande. 

Scandale ou drôlerie ?


Un gestionnaire de fortune a peur d'être tondu par Hollande
 
  
Cette publicité est en fait l'éditorial du patron de ce cabinet, Edouard Carmignac, publié sur le site de l'entreprise le 4 juillet dernier. Carmignac Gestion est une société de placements en Bourse pour des particuliers ou des conseillers indépendants (40% de sa clientèle), des institutions (10%), ou des établissements financiers (50%) . Pour 2012, elle déclare gérer ainsi environ 48 milliards d'euros, la moitié placée en actions (54%), l'autre en obligations (46%), notamment d'Etat. 
  
Les arguments employés par le président-fondateur de ce fond de placement sont caricaturaux et emblématiques: 
  
1. « La mise en place d’une fiscalité confiscatoire décapiterait les états-majors de nos entreprises, accélérant l’exode de leurs dirigeants, tout en gelant l’investissement chez les PME.  » Si l'on omet quelques instants le prélèvement de 75% de la tranche de revenus supérieure à un million, les autres augmentations d'impôts révélées la semaine dernière sont (malheureusement) très mesurées pour les plus riches. Le matraquage fiscal dénoncé par la droite n'a pas eu lieu. 
  
2. L'auteur accuse Hollande « de tondre également les classes moyennes » ce qui « renforcerait la fragilisation de la valeur travail amorcée par les 35 heures ». Il n'en sait rien, et n'apporte aucune preuve. C'est l'habituel délire des militants sarkozystes les plus aigris. Le gouvernement Sarkozy a enflammé les prélèvements obligatoires du plus grand nombre, réduit les remboursements de santé, allongé les cotisations retraites. Mais on appelait cela de la «» réforme 
  
3.  « La surfiscalisation des heures supplémentaires rognerait » le pouvoir d’achat des classes moyennes. De quoi parle-t-il ? Sans doute de la suppression, annoncée, de la défiscalisation des heures supplémentaires. Notez la formule: retirer une exonération (partielle) de cotisations sociales et d'impôts sur le revenu devient une « surfiscalisation ». C'est du grand n'importe quoi ! Mieux, le gestionnaire de fortune ne dit mot de l'augmentation générale de la TVA décidée par Nicolas Sarkozy et annulée par François Hollande. 
  
4. Carmignac est en rage que François Hollande veuille ainsi « tondre l’ensemble du pays afin d’assurer la survie d’un modèle social obsolète ». Lors du premier choc de la Grande Crise, en 2008/2009, ce « modèle social obsolète » a justement permis au pays de résister plus que d'autres : le poids des rémunérations publiques et transferts sociaux a évité à la consommation de s'effondrer; les filets de sécurité sociale ont insuffisamment joué mais joué quand même ; les retraites, heureusement financées par répartition et non par capitalisation, n'ont pas disparu. Carmignac n'est pas à une contradiction près: quelques lignes plus bas, il évoque la nécessité de « consolider la viabilité de l’essentiel de nos avancées sociales». 
  
5. Au détour de l'un de ses arguments creux, on comprend enfin les vraies raisons de la rage de ce fortuné: « le projet d’augmentation du Livret A faciliterait certes le placement de la dette publique, mais engouffrerait une part accrue de l’épargne populaire dans un placement à la rentabilité médiocre. » La belle affaire ! Le gestionnaire de fortune plaide pour sa paroisse, le placement privé plutôt que le Livret A. Le lobbyiste est médiocre. 
  
Finalement, cette intervention politique dévoile le bien faible sentiment patriotique de son auteur. Les temps sont rudes, la solidarité est nécessaire. Mais voici qu'il ne penser qu'à hurler pour son argent: « La mise en place d’une fiscalité confiscatoire décapiterait les états-majors de nos entreprises, accélérant l’exode de leurs dirigeants ». Ces riches développent toujours la même argumentation: pas touche à nos revenus, surtout de la rente (les placements) sinon le pays va sombrer... 
  
Fichtre ! L'exode ! On se croirait en 1789... 
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6 juillet 2012 5 06 /07 /juillet /2012 09:37

En créant une régie publique, Gabriel Amard, président PG de la Communauté d'agglomération « Les Lacs de l'Essonne » s'est attiré les foudres de la Lyonnaise des eaux (Groupe Suez environnement). Le géant privé de l'eau s'est donc tourné vers un cabinet de lobbying, Vae Solis, qui s'est donné pour mission de « discréditer » l'action de l'élu de gauche. Chargé du « pilotage » de cette « mission » de déstabilisation ? L'actuel chef de cabinet du ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll !

 

Gabriel Amard, dans le colimateur de la Lyonnaise des eaux (DR)

Vae solis, « Malheur à celui qui va seul », en latin. Gabriel Amard, ancien du PS et actuel secrétaire national du Parti de gauche de Mélenchon, a eu le « malheur » non pas d’aller seul, mais d’aller contre. Contre la « logique » qui obligerait les municipalités à déléguer aux géants du privé la gestion de l’eau. Comme président de la communauté d’agglomération « Les Lacs de l’Essonne »  (regroupant les communes de Grigny et de Viry-Châtillon), il a décidé de créer une régie publique. De quoi susciter « l’inquiétude » de la branche régionale Ile-de-France sud de la Lyonnaise des eaux (Groupe Suez environnement). Privée de son fromage, elle s’est tournée vers Vae Solis, un « cabinet de conseil en stratégie de communication et gestion de crise » au nom si judicieusement choisi. 
  
Marianne s’est procuré des documents (voir ci-dessous) datés de fin 2011 et début 2012 qui montrent, dans le détail, l’art et la manière de mener une opération de lobbying. Rien que de très classique, selon le président de Vae Solis, Arnaud Dupui-Castérès, que nous avons contacté : « Notre métier est de permettre à toutes les parties prenantes de faire entendre leur point de vue. Dans ce dossier, la Lyonnaise n’arrivait pas à faire entendre sa voix. » Vae Solis propose pourtant de « limiter et réduire, en la discréditant sur le fond, la communication » jugée « agressive », voire « outrancière » du président de la communauté d’agglomération. En somme, de faire taire sa voix… Le cabinet préconise aussi de fournir en« informations »« éléments de langage » et « notes blanches » (sic) les opposants au projet, comme Jean-Marie Vilain, un élu du groupe UMP-Nouveau Centre de Viry, et d’œuvrer enfin« à la publication de quelques articles dans la presse nationale et locale ». Mais, comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, le cabinet de conseil, est-il écrit, « continuera à alimenter » un blog, « MonVirynature  », pourtant censé être animé par un simple citoyen de Viry-Châtillon « touché par le virus de l’écologie » ! 


RÈGLEMENTS DE COMPTE(UR)S (D’EAU) ENTRE AMIS DE GAUCHE !

L’affaire, qui donne à voir à l’échelle locale comment agit une multinationale pour mettre sous pression un élu, prend un tour cocasse quand on constate à la lecture des documents que l’homme devant mener le« pilotage de la mission » est… un socialiste ! Et pas n’importe lequel : Antoine Boulay, alors directeur général de Vae Solis, est aujourd’hui… chef de cabinet du ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll ! Voilà qui fait désordre quand on sait que d’autres éminents membres du gouvernement, comme Manuel Valls à Evry et Pierre Moscovici à Montbéliard, ont enclenché, eux aussi, le passage à une régie publique. 
  
Antoine Boulay, lui, explique ne « plus se souvenir très bien » de cette mission ; et si son nom apparaît sur ce genre de document, il n’était pas toujours directement à l’œuvre. D’ailleurs, il explique avoir choisi « de changer de vie » et se dit aujourd’hui « content de ne plus avoir de clients » et « d’œuvrer à l’intérêt général » ! 
  
« Œuvrer à l’intérêt général », c’est aussi ce que Gabriel Amard pense avoir fait sur son territoire. L’élu se montre finalement peu surpris d’avoir été l’objet d’une telle attention de la part de la Lyonnaise des eaux : « Je les comprends. A chaque fois qu’ils ont tenté de nous barrer la route, ils se sont cassé les dents. Moralement, ça devait être dur pour eux ! » En revanche, sur le cas Boulay, Amard se montre beaucoup moins compréhensif : « C’est l’exemple même du compromis intellectuel auquel s’adonnent certains socialistes… » 

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 17:07

 par André Bellon

Vacances. Le mot évoque repos, plages, mer. Et pourquoi se priver de cette évocation de période paisible, loin du lieu de travail ?

Mais vient aussitôt à l’esprit l’idée déplaisante de ceux pour qui vacances ne signifie rien, ceux qui n’ont pas de congés parce qu’ils n’ont pas de travail ou simplement ceux qui n’ont pas les moyens de partir. Mais il ne faut pas gâcher le plaisir. Les vacances permettent de découvrir le monde, des paysages inconnus, des civilisations différentes. Encore que…, comme disait l’autre, « Le tourisme est l’industrie qui consiste à transporter des gens qui seraient mieux chez eux, dans des endroits qui seraient mieux sans eux ». Cette remarque serait de mauvais goût si nous n’avions pas parfois l’impression que nombre de touristes considèrent leur lieu de visite comme un enclave idyllique, découvrant parfois avec terreur qu’il y a là des risques de séisme ou même, comble de l’horreur, des gens qui souffrent et parfois se révoltent… y compris parfois aux dépends des touristes. 

Pourtant, le dictionnaire nous apprend que vacant peut signifier disponible. Ce n’est effectivement pas l’image qui prédomine chez le touriste standard. Mais, fort heureusement, le même dictionnaire (petit Robert), nous apprend qu’il s’agit là d’un sens rare et relativement désuet.

La vacance est aussi une interruption, par exemple la vacance des tribunaux. Cela vaut mieux si on considère que la rentrée peut être relativement dense pour eux. Pour les collégiens en revanche, c’est la liberté.

De façon plus générale, on parle de « vacance du pouvoir ». Quand le pouvoir n’est pas là, il est apparemment à prendre. C’est, semble-t-il, le cas en Egypte. C’était le cas en France il y a quelques mois. Mais n’était-ce pas une illusion et cette vacance ne cachait-elle pas des pouvoirs moins apparents, souvent plus lointains, mais assez pérennes ? Bruxelles, FMI, opérateurs financiers,… ?

Bref, les vacances sont un intervalle entre deux périodes. Sont-elles identiques ? Seront-elles au contraire très opposées ? Continuité ou changement ? Mais, comme le disait André Malraux, « La Révolution, c’est les vacances de la vie ».


André Bellon

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 17:02
Résurgence des anti-Lumières




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 Jeudi 05 Juillet 2012

 par Anne-Cécile Robert



Pourquoi diable parler des anti-Lumières en 2012 ? Ce courant de pensée, né au XVIIIe siècle, avait pour objectif de combattre la philosophie des Lumières alors en pleine expansion et sa version réalisée : la Révolution française. De tels débats peuvent sembler anachroniques aujourd’hui. Et pourtant ! Petit à petit, depuis les années 1980, reparaissent les thèmes chéris de ce courant réactionnaire. Evidemment, personne (ou presque) ne défend la monarchie de droit divin ou ne prétend que les nobles disposent par nature de privilèges sur les autres êtres humains. En revanche, deux piliers des anti-Lumières ont effectué un retour fracassant dans la vie intellectuelle et politique en Europe et en Occident : d’une part, le fatalisme devant l’ordre immuable des choses et ses avatars ; d’autre part, la critique de la raison telle que les philosophes des Lumières, inspirés par Descartes, la concevaient, c’est-à-dire l’outil principal de l’émancipation humaine.


Les manifestations de fatalisme sont légion en ce début de XXIe siècle, en particulier dans le domaine économique. Les (ir)responsables publics passent leur temps à expliquer qu’il n’existe qu’une seule voie possible (à quelques virgules prêts) pour lutter contre la crise financière, qu’on ne peut pas agir autrement face à l’Europe, que trop de redistribution sociale pénaliserait les entreprises, que d’ailleurs les inégalités sont nécessaires au dynamisme économique, etc. La faible augmentation du smic par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, alors que le pouvoir d’achat des catégories populaires se réduit comme peau de chagrin, est ainsi justifiée par les « contraintes européennes », présentées comme des fatalités contre lesquelles on ne peut rien. De même, les causes de la crise financière de 2008 ont été occultées avec obstination, celle-ci étant perçues comme l’aléa d’un système sain par nature. On ne peut empêcher quelques brebis galeuses de semer la pagaille de temps en temps. Que voulez-vous, c’est ainsi : dans un océan d’esprits avisés et brillants, surnagent forcément quelques Jérôme Kerviel arrivés là par hasard…


Que ce fatalisme conduise irrémédiablement au maintien de la structure inégalitaire des revenus aurait sans doute paru normal aux porte-parole des anti-Lumières. Ces derniers ne considéraient-ils pas que les paysans étaient à leur place lorsqu’ils servaient gratuitement les nobles en accomplissant les fameuses corvées. Joseph de Maistre et Edmond Burke seraient sans doute très à l’aise dans notre monde mondialisé où ils figureraient probablement parmi les stars des commentateurs télévisés des Conseils européens.


Pas étonnant, dans ce contexte, que la raison fasse l’objet d’attaques en règle. Celle-ci ne saurait en effet perturber l’ordre naturel des choses défini par Dieu. Depuis les Lumières, il était communément admis dans les démocraties que l’être humain pouvait, par sa raison, maîtriser son destin. Les discours fatalistes rendent ce principe obsolète puisque le cercle des événements qui ne dépendent pas de la volonté humaine s’étend avec la zone d’impact de la crise financière. De manière plus perverse, la raison est attaquée sur sa gauche par une certains intellectuels dits progressistes. On lui reproche notamment de nier les sentiments et de proposer une vision mécanique de l’individu. Au XXe et au XXIe siècle, des sociologues de gauche comme Alain Touraine mettent ainsi en avant la subjectivité de l’être humain et sa part légitime d’expression personnelle au travers du thème de l’identité. Mais jamais les philosophes des Lumières n’ont défendu une conception fermée de la raison. Dans la palette des instruments de connaissance (foi, passion, raison), ils estimaient que la raison était la mieux à même de donner des résultats concrets et surtout partageables avec les autres humains, tous étant dotés de raison. Point n’était question d’attribuer à cette dernière un brevet d’exclusivité.


Par ailleurs, certains – tel Pierre-André Taguief - accusent la raison de conduire, sous certaines conditions, au totalitarisme, notamment par le biais des sciences et de l’idéologie du progrès. Mais ne confondent-ils pas raison et technosciences ? Ne donnent-ils pas de la raison une vision purement instrumentale ? Pour des philosophes comme Condorcet, le progrès technique n’était pas dissociable de progrès moral et ne devait pas l’être. Les Lumières ne séparaient pas les sciences de la culture et de l’éducation. On comprend mal alors que certains auteurs du XXe siècle – c’est le cas de l’Allemand Max Horkheimer - aillent jusqu’à prétendre que la « raison a conduit à Auschwitz ». Si les chambres à gaz relèvent effectivement de l’industrie de la mort, qu’y a-t-il de moins rationnel que l’idée de hiérarchie entre les races ? 


On est loin de la critique constructive des dérives d’une raison absorbée par le capitalisme. Il s’agit d’une attaque frontale, destinée à déconstruire une certaine vision de l’être humain. Car, au-delà des débats philosophiques, par définition ouverts et libres, les conséquences politiques et sociales des idées issues des Anti-Lumières sont claires : elles justifient l’ordre ultralibéral avec son cortèges d’inégalités, d’injustices et d’atteintes à la démocratie.


Anne-Cécile Robert

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 16:58
   Victoire mais...

par le journal République


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 Jeudi 05 Juillet 2012

 La Gauche a gagné les élections présidentielles puis, dit-on, les élections législatives. 
Deux observations s'imposent, une troisième observation est plus discutable donc plus intéressante :
- L'abstention est massive aux législatives, au premier comme au deuxième tour. 
- L'extrême droite a réalisé, aux Présidentielles comme aux Législatives un score inespéré.
Il n'y a rien là de très surprenant. Nous savons depuis plus longtemps qu'il n'y a plus d'élections législatives en France. Elles constituent le reflet de l'élection Présidentielle. Elles en sont une réplique comme pourraient dire le vulcanologues. L'instauration du quinquennat a consacré cette situation. 
Elle l'a sanctuarisé comme pourraient dire les théologiens. Il n'est par conséquent pas surprenant que les électeurs négligent les législatives. Ils en connaissent le résultat bien avant d'aller voter ou de s'abstenir. Les romans policiers seraient beaucoup moins lus si les auteurs livraient le nom de l'assassin dès la première page. Ce qui est nouveau, en 2012, est que l'abstention aux législatives se double d'une poussée considérable du vote Front National aux Présidentielles et aux deux tours des Législatives, c'est à dire d'un vote de protestation radicale par le seul moyen qui est offert à ceux qui ne veulent pas s'abstenir ou voter blanc. Le seul moyen répétons-le. Les autres voies à vocation protestataire se sont rapidement révélées des chemins creux, dans le Sud certes, mais dans le Nord aussi.


2012 risque donc d'apparaitre dans l'Histoire comme l'année de la première vraie poussée matérialisée de refus du système actuel. Cette perspective est rendue particulièrement dangereuse qu'elle pourrait se cristalliser autour de pensées simplistes, plus précisément de slogans tels les célèbres "tous pourris" ou " sortons les" dont les historiens savent qu'ils traduisent une vraie pensée dont les maléfices n'apparaissent qu'à l'instant ou leurs auteurs accèdent au pouvoir. Il en est ainsi des extrêmistes, de Droite ou de Gauche.Ils avancent masqués.Ils peuvent même apparaitre joyeux et sympathiques jusqu'à l'instant où ils accèdent au pouvoir ; "alors le masque tombe", dirions nous si nous nous laissions aller, nous aussi, aux formules d'usage. Nous en sommes en France. Prenons garde à ce que de que la vague n'emporte pas, avec des institutions dépassées, le suffrage universel que nous tenons pour indépassable. 
Une troisième observation va dans le même sens mais pourrait provoquer plus de débats :
- La très forte remontée de Nicolas Sarkozy dans les derniers jours précédant chacun des deux tours de la Présidentielle confirme le rejet du système.
Si un Président aussi impopulaire et rejeté a néanmoins réussi à n'être battu que de justesse, c'est évidemment parce que les citoyens que la politique n'intéresse pas, et qui se révèlent plus nombreux que jamais, se sont, comme toujours, décidé le plus tard. Leur message est clair, ils ont voulu dire que tant qu'à faire ils préféraient garder celui auquel ils étaient habitués qu'en choisir un nouveau. Ce réflexe ne surprendra aucun politologue. Même s'il doit servir François Hollande dans cinq ans, il serait imprudent de sa part d'oublier qu'il peut aussi montrer que nombre de citoyens qui ont voté sans aller aux extrêmes peuvent rejoindre les rangs des protestataires radicaux pour peu que telle ou telle mesure les scandalise donc les réveille. 
L'expérience montre que c'est parmi ces gens là que se recrutent les gros bataillons de la violence révolutionnaire.

Les conditions apparaissent donc réunies pour que la France connaisse dans les mois ou les années qui viennent un de ces violents coups de vent qui font son Histoire. La question essentielle n'est pas de savoir si on le redoute ou si on l'espère. La question essentielle est que nul ne pourra vraiment prétendre n'avoir rien vu venir.

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 12:06
Le Tour de Gauche 2012: l'équipe du FDG n'a pas démérité, elle a joué franc jeu
(35)
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melenchon14Bons résultats de l'équipe Front de gauche. Elle a sorti N. Sarkozy de l'Elysée et empêché Marine Le Pen d'entrer au Palais Bourbon.

Le bloggeur Mélenchon est revenu sur les scores du  Front de gauche et il nous livre son analyse politique sur le Front de gauche et son avenir. Ses réflexions ont inspiré le commentaire qui suit .

« Je me sens comptable, écrit JL Mélenchon, de l’élan que ma candidature à la présidentielle a pu mettre en mouvement.». Et ce ne sont pas seulement ses talents d’orateur qui y ont contribué.

Je crois en effet que cet élan a aussi pour nom la démocratie, notre démocratie en choc frontal avec la crise que traverse la société, la nôtre mais aussi celle de nos voisins européens. Au fond la question est : que nous arrive-t-il ? Le fait même de poser la question ouvre sur la responsabilité, notre responsabilité tant individuelle que collective. Ce n'est pas le moindre des mérites de la campagne de JL Mélenchon dont on peut s'enorgueillir et pas uniquement d'un point de vue partisan.

Dans la quête d’une réponse, j’ai trouvé ou plutôt j'ai appris à constater le primat de l’économique sur le politique et le formatage de l’idée de bonheur ou de progrès que la richesse induit. On a oublié, qu'aussi loin que l'on remonte dans les société primitives, que la richesse chez les hommes c’est le partage et le premier partage est celui que l'on fait de la vie, ce court instant que dure la vie. L’instant est devenu le temps, le temps est devenu l'argent et l’argent est devenu volonté de puissance et impuissance de la pauvreté. Même interrogation : mieux vivre pour partager, ou partager pour mieux vivre ? Ou alors,  qui suis-je ? un riche ou un pauvre ?

Il faut avant toutes choses se mettre à l’ouvrage sur la ligne économique : production-consommation, transport-proximité, pouvoir d’achat-salariat, capital-travail, libéralisme-communisme, environnement-écologie, oligarchie-citoyenneté, droit-nondroit etc… Et travailler en autodidacte : ce n’est pas une mince affaire mais c’est aussi incontournable que l’action qui nous presse.

Certes il est bon de savoir comme le précise JL Mélenchon que le Front de gauche «  n’a pas commencé par autre chose qu’une mise en mouvement » et une « volonté d’avancer vers le même horizon ». Là aussi j’ai pu constater ou faire l’expérience que le premier horizon qui se dessine, c'est celui qui est crié dans les meetings « Résistance ». Chacun, me semble–t-il,  doit en connaître le sens : conscience démocratique et sentiment d’injustice. En est-il de même de sa portée pratique ?

Avec le Front de Gauche, répète JL Mélenchon, nous sommes « les tenants d’une autonomie conquérante ». Cela signifie quoi ?

Pour y répondre, il m'apparaît indispensable de revenir ou de se centrer sur le point de départ du mouvement, qui est le choix de la ligne économique, car l'économie c'est l’épine dorsale de la vie collective. Face à l’enkystement des riches dans le régime totalitaire du super profit, le langage de la pauvreté n’est pas mort, celui de la souffrance non plus. Il faut comprendre que la stratégie d’action du Front de Gauche est d’accompagner la vie collective jusqu’à cette  ligne de crête : celle du départage entre ceux qui accaparent et les autres, entre le système qui opprime et celui qui libère, entre l’avenir de l’humain et sa perte, entre une civilisation universelle et une barbarie mondialisée. Tel est l’enjeu de la mise en mouvement du Front de gauche. Il s’agit de réinventer la vie économique en prenant appui sur la puissance et le language des pauvres : l’implication populaire en est la seule et nécessaire  condition.

« Si le Front de gauche n’a de sens que par son action » comme le commente JL Mélenchon, j'ajoute que sa réussite n’a de sens que dans son abnégation. Un seul mot d’ordre s’impose : lutter et résister dans toutes les actions, petites ou grandes, qui choisissent ce parti pris de contrarier l’oligarchie des puissances de l’argent qui nous gouvernent avec la complicité de nos représentants. Les tâches du Front de Gauchesont dans tout ce qui bouge et font progresser "l'humain d'abord"  et  il serait vain en effet de le définir suivant les catégories habituelles des groupements politiques. Il est cet « outil précieux » au service d’une démarche collective et alternative qui fait front et rassemble pour la conquête du pouvoir si la volonté générale le souhaite. En effet, et chacun l'aura compris, la mutation de notre société vers un autre modèle de développement économique a besoin aussi de la loi, de la force de la loi que confère le pouvoir d'Etat. L’avenir du Front de gauche est tout tracé : combattre le système oligarchique  fondé sur un ultra libéralisme dont la crise nous a dévoilé les effets destructeurs et l'irresponsabilité sociale de ses acteurs. Tout le reste n'est que balivernes pour conservateurs impénitents. La révolution est dans les urnes et dans le courage de nager à contre courant, mais plus on est, moins on s'épuise ! c'est de l'écologie mes amis. 4 millions de mélenchonistes,  c'est un excellent  résultat, une force d'entraînement capable de dépassement, c'est dans ce dépassement qu'est la réussite et pas ailleurs.

Un dernier mot : ce même horizon partagé qui fixe la direction, n'empêche pas  de s’interroger sur la capacité de chaque composante du Front de gauche à faire front, sur la capacité à se rassembler qui relève de leur propre responsabilité. On peut d'autant plus facilement penser avant d'agir que les actions ont une intention commune dépourvue d'ambiguité. Je ne reprendrai pas cette vieille formule politique du Cardinal de Retz " On ne sort de l'ambiguité qu'à son détriment" mais je conclurai volontiers : autant ne pas y entrer lorsqu'on commence quelque chose.

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 10:13
Le Front de Gauche au miroir de Syriza
(55)
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"Le Front de Gauche au miroir de Syriza"

 

par Philippe Marlière (4 Juillet 2012 sur "Mediapart")

http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-marliere/040712/le-front-de-gauche-au-miroir-de-syriza

Les partis membres du Parti de la Gauche Européenne ont connu des trajectoires électorales diverses ces dernières années. Dans le contexte de la crise profonde du capitalisme et de l’échec de la social-démocratie au pouvoir, ces partis ont enregistré des succès prometteurs, quoique éphémères. Depuis une dizaine d’années, certains partis de la gauche radicale ont passé le cap de 10% des voix lors de scrutins nationaux ou européens. C’est le cas notamment de Die Linke (Allemagne) d’Izquierda Unida (Espagne), du Bloco de Esquerda (Portugal) et du Socialistische Partij (Pays-Bas). Après une avancée électorale prometteuse dans les années 2005-10, ces partis sont aujourd’hui au creux de la vague, même s’ils conservent des scores supérieurs à 5% des voix, ce qui en fait des forces non-négligeables dans le jeu politique national. Plus récemment, deux partis ont remporté des succès électoraux remarquables : le Front de gauche (France), lors de l’élection présidentielle de 2012 (11,1%) et Syriza (Grèce), passé de 4,9% en 2009 à 26,9% en juin 2012.

De manière générale, les résultats électoraux apparaissent mitigés et fluctuants d’une situation nationale à une autre. Les cycles d’essor et de repli électoraux de ces partis se déroulent de manière asynchrone. Le cas de Syriza est différent de l’ensemble des autres partis de la gauche radicale. Ce parti fut très près de remporter l’élection législative en juin 2012. Il est nécessaire de comprendre les raisons de cette percée historique. Il est également important d’analyser les résultats mitigés du Front de gauche : bon, lors de l’élection présidentielle, le score du Front de gauche fut plutôt décevant à l’occasion des élections législatives.

 

Des cycles d’essor et de repli électoral asynchrones

Les partis de la gauche européenne sont confrontés à des enjeux politiques largement similaires. Tous se trouvent dans l’opposition à la droite néolibérale-conservatrice au pouvoir dans la plupart des pays membres de l’Union européenne (UE). Ces formations affichent une distance critique vis-à-vis des partis sociaux-démocrates, qu’ils soient au gouvernement ou non. Une telle opposition n’exclut d’ailleurs pas des accords électoraux de désistement, voire des accords de gouvernement au niveau local ou régional. Depuis la  participation désastreuse de Rifondazione Communista (Italie) au gouvernement Prodi (2006-08), plus aucun de ces partis n’a gouverné avec des forces sociales-démocrates. La social-démocratie qui avait mis en œuvre des réformes néolibérales et austéritaires quand elle était au pouvoir (Grande-Bretagne, Espagne, Portugal, Allemagne), a été sévèrement battue. L’élection de François Hollande et la victoire de la gauche aux élections législatives en France marquent une première inflexion à gauche dans un paysage européen qui reste largement dominé par la droite.

On notera que les échecs de la social-démocratie au pouvoir ont peu profité à la gauche radicale en général. Ce que l’on appelle de manière impropre le « vote utile » a largement contribué au succès de Hollande aux 1er et 2e tours de l’élection présidentielle. Une fraction d’électeurs attirée par le programme du Front de gauche – « plus à gauche », « plus social » que celui du candidat socialiste – a néanmoins choisi de voter pour un candidat en qui ils n’avaient que modérément confiance. Pourtant, Hollande ne défendait pas le programme dont ces électeurs se sentaient le plus proche. Il a cependant nettement dominé le candidat du Front de gauche au 1er tour, dont la campagne avait mobilisé et politisé des foules importantes.

Remarquons de manière générale que les percées électorales (et les replis) de la gauche radicale sont asynchrones. Il n’existe pas à proprement parler de convergences transnationales du vote pour les partis de la gauche radicale. Quand un parti perce dans un pays européen, ce succès est souvent isolé, et ne s’accompagne pas automatiquement de victoires similaires dans d’autres pays au même moment. Rifondazione Communista a connu un essor significatif en 2006, dans le contexte d’une victoire de la gauche italienne et du rejet du gouvernement Berlusconi. Deux ans après son entrée dans le gouvernement Prodi, le parti implosait et perdait tous ses députés à la chambre. Die Linke, Izquierda Unida et Bloco Esquerda ont enregistré des succès plus tardifs, davantage liés au discrédit de la gauche sociale-démocrate au pouvoir qui, dans ces trois pays, avait mené des politiques néolibérales très impopulaires. Après des résultats encourageants, ces partis ont perdu des voix et une partie de l’influence acquise. Entretemps, les partis sociaux-démocrates ont recouvert une partie du terrain perdu (notamment en Allemagne).

Quelle conclusion peut-on tirer de ce mouvement de balancier électoral ? D’une part, on peut estimer que l’affaissement électoral de la social-démocratie n’a, jusqu’à présent, jamais atteint un point de non-retour (à l’exception peut-être aujourd’hui du PASOK, mais la tendance devra être confirmée lors d’élections futures). D’autre part, les mouvements de balancier électoraux ne sont que rarement synchroniques. Quand ils le sont (dans les cas français et grec), ils sont provoqués par des événements endogènes dans chaque pays. On remarque en effet que les évolutions électorales de la gauche radicale sont avant tout liées aux rapports de force et au « climat » politique au sein de chaque pays concerné. En 2005, le traité constitutionnel européen n’avait été véritablement combattu qu’en France et aux Pays-Bas  (le SP  néerlandais était activement impliqué dans la campagne du Non), alors que les autres partis de la gauche radicale affichaient une certaine indifférence à son égard. Certains pays sont davantage réceptifs aux thèses de la gauche radicale que d’autres pour des raisons endogènes (système électoral, compétition ou non à gauche, social-démocratie au pouvoir ou non, mouvements sociaux forts ou pas, culture politique nationale, etc.).

 

Leçons des votes grecs

Sur le plan politique, La France et la Grèce constituent indiscutablement la tête de pont de la résistance européenne aux politiques néolibérales et austéritaires. Ce sont des pays qui ont des traditions de radicalité. Tous deux ont connu des mouvements sociaux importants et quasi-continus depuis plus de 15 ans. Le terrain était donc propice à une telle évolution, encore fallait-il que des circonstances exceptionnelles viennent permettre à Syriza de dépasser un PASOK discrédité et de rivaliser avec la Nouvelle Démocratie (ND), elle aussi largement rejetée par l’électorat.

Ceci dit, les deux situations ne sont pourtant pas identiques. En Grèce, Syriza est devenu le premier parti de gauche après l’effondrement du PASOK, un parti aux politiques néolibérales qui a accepté sans combattre le diktat de la troïka et a, par la même, trahi les intérêts du peuple. La percée fulgurante de Syriza s’explique par trois facteurs corrélés :

a) Dans un contexte de crise économique et sociale sans aucune mesure depuis plusieurs décennies en Europe, les Grecs ont sanctionné le PASOK, parti lié au mémorandum qui, depuis trois ans, plonge la Grèce dans une crise sociale et économique sans précédent. La chute du PASOK est un événement aussi important que ne serait l’effondrement du PS en France dépassé par le Front de gauche ;

b) Le succès de Syriza intervient après quatre années de récession et de plans d’austérité imposés par le FMI, l’UE et la BCE. C’est un pays quasiment au bord de la cessation de paiement. Il s’agit donc d’une situation en tout point exceptionnelle qui est incomparable avec la France ;

c) La campagne de Syriza a été exemplaire : d’une part, la démarche de la gauche radicale grecque a été unitaire de bout en bout ; d’autre part, Syriza a su proposer des débouchés radicaux, clairs et réalistes au peuple grec.

La décision de Syriza de concentrer ses attaques sur le mémorandum, en promettant notamment son abrogation, puis la renégociation de la dette publique grecque dans le cadre européen, s’est avérée décisive. Loin de dissuader les électeurs de voter pour lui, cet engagement a favorisé le ralliement des couches salariées modérées, touchées par la thérapie de choc néolibérale et qui se sentaient trahies par le PASOK. Syriza a pris la décision d’abroger le mémorandum – quelles qu’en soient les conséquences – dans les semaines précédant le vote du 6 mai. Cet engagement a suscité une dynamique politique qui s’est traduite par des gains électoraux importants. Syriza est apparu comme le seul parti à gauche qui s’opposait de manière claire et pratique aux mesures austéritaires du PASOK-ND. Il a également porté la vague de mécontentement populaire en Grèce, en s’investissant dans les mouvements sociaux qui s’opposent aux plans d’austérité. Inversement, le KKE (Parti communiste orthodoxe) a dénoncé ces mouvements sociaux, estimant qu’ils étaient manipulés par des « éléments petit-bourgeois ». Le KKE a également refusé de rencontrer Syriza lorsque ce dernier avait été chargé de former un gouvernement après le vote du 6 mai. Syriza préconisait un « gouvernement de gauche anti-austérité maintenant », pendant que le KKE se repliait sur une ligne sectaire qui l’éloignait des luttes et des préoccupations des Grecs. Logiquement, le KKE a payé le prix de son sectarisme qui n’offrait aucun débouché politique. Il est passé de mai à juin 2012, de 8,5% à 4,49% des voix. Démarche unitaire à gauche et volonté de résoudre concrètement la crise ont été la clé du succès de Syriza en Grèce.

 

Front de gauche : considérations stratégiques

Le score de Jean-Luc Mélenchon à l’élection présidentielle est exceptionnel à plusieurs égards. La campagne de Mélenchon fut dynamique, joyeuse et politisée. Des foules impressionnantes sont venues assister à ses réunions publiques. Les mesures-phare du programme du Front de gauche ont été exposées au public, bien au-delà des cercles traditionnels de la gauche radicale. Jean-Luc Mélenchon a débattu et triomphé de Marine Le Pen, et démontré à tous que le programme du Front national était toujours d’une facture d’extrême droite classique. Il s’est fait un porte-parole talentueux et convaincant du meilleur programme que la gauche ait présenté à une élection présidentielle sous la 5e république. Et pourtant, le score du candidat de Front de gauche fut en deçà des attentes suscitées par des sondages qui l’avaient placé à 15% des intentions de vote. Verre à moitié rempli ou verre à moitié vide ? On peut regarder le résultat de deux façons. Il s’agit en fait d’un excellent résultat qui a positionné le Front de gauche comme second parti de gauche en France. Hélas, ce capital politique a été dans une certaine mesure dilapidé lors des élections législatives qui ont suivi. Essayons de comprendre ce qui s’est passé et de tirer les conclusions de cette double séquence électorale.

Sur le plan strictement électoral, on peut considérer que les élections législatives ont constitué une avancée pour le Front de gauche : en 2007, les candidats du PCF avaient recueilli 4,5% des voix au premier tour et 19 élus communistes ou apparentés avaient été élus ; contre 6,9% en 2012 et 10 députés élus (soit près de 700.000 voix de plus qu’en 2007). La raison de ce recul paradoxal est la forte poussée en voix du PS qui lui a permis, avec ses alliés du MDC et des radicaux de gauche, de remporter la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Notons que seuls 44% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon ont voté pour des candidats du Front de gauche, et 38% d’entre eux se sont reportés sur le PS (inversement, 5% des électeurs de François Hollande ont voté pour des candidats de Front de gauche).

Le vote Hollande-PS possède deux caractéristiques majeures : d’une part, il s’agit d’un vote de rejet ou d’élimination (du sarkozysme) et non d’adhésion (à la social-démocratie modérée hollandaise). D’autre part, c’est un vote de défense de l’Etat social (services publics, revalorisation des salaires, emplois). François Hollande et le PS ont pu compter sur le soutien important de l’électorat populaire (ouvriers et employés). Le score du Front de gauche dans les catégories populaires est honorable, mais il est largement distancé par le PS. Pourtant, le Front de gauche avait un programme plus à même de protéger les catégories populaires que le PS. Une majorité d’entre eux a néanmoins estimé que le vote Hollande-PS était le moyen le plus efficace pour se débarrasser de Sarkozy et de la droite, même si cela impliquait de choisir la version la plus édulcorée du programme à gauche. En d’autres termes, les classes populaires ont estimé qu’il valait mieux voter pour le parti qui possédait le plus de chance de battre le sarkozysme dans les urnes. Une chose est de déplorer le social-libéralisme du PS, une autre est de se donner les moyens, par le biais du vote, de battre le sarkozysme, un danger plus grand et plus direct. L’aspiration unitaire au sein de l’électorat de gauche était également très forte. Tout ce qui tendait à diviser la gauche (y compris les attaques personnelles contre le candidat socialiste) était mal perçu, car la cible de toutes les attaques, pour les électeurs de gauche, devait être le sarkozysme.

Jean-Luc Mélenchon et le Front de gauche ont probablement sous-estimé cette aspiration unitaire et le désir de battre la droite qui dépassait en importance toute autre chose. Porter le fer contre Marine Le Pen a certainement été utile étant donné le rapprochement entre l’UMP et le FN. Il n’en demeure pas moins que les électeurs avaient avant tout à cœur de battre le sarkozysme, et son « néo-conservatisme à la française ». La campagne de Mélenchon à Hénin-Beaumont fut remarquable en ce qu’elle a mis en scène une gauche de gauche militante et populaire dans un bastion socialiste, gangrené par la corruption et l’emprise croissante du FN. Mais cet enfermement dans une circonscription où le PS et le FN sont bien implantés était une entreprise risquée et décalée par rapport aux aspirations des électeurs. En dépit d’une belle campagne, Mélenchon n’a pas pu rattraper le candidat socialiste dans une région où le vote socialiste est atavique depuis des décennies.

La (re)politisation des masses populaires est un processus nécessaire et vital. Il faut faire prendre conscience aux classes populaires que leur intérêt de classe passe par un abandon du vote socialiste et le rejet du FN. Ceci dit, on ne peut espérer atteindre cet objectif en l’espace d’une campagne électorale. Il s’agit d’une œuvre de longue haleine, qui doit impliquer sur le terrain les élus et les militants. Mélenchon a développé un discours antifasciste reposant sur une critique de classe du FN. Cette démarche est fondamentale, même s’il faut reconnaitre qu’elle a davantage mobilisé la fraction politisée de l’électorat.

Il était important de davantage concentrer les attaques sur l’UMP sarkozyste et, dans un deuxième temps seulement, sur le FN. La critique du programme du PS aurait pu prendre toute sa force et être plus crédible auprès d’un électorat de gauche modéré, une fois le combat anti-sarkozyste pleinement accompli. De la même manière, il aurait été souhaitable de mieux prendre en compte les effets du système bonapartiste de la 5e république. Celui-ci personnalise à l’extrême les débats et réduit les oppositions à un choc PS-UMP, auquel le Front de gauche ne pouvait participer étant donné le rapport de force actuel à gauche. Il aurait fallu obtenir que le PS/EELV ne présente pas de candidats face à des élus Front de gauche, ce qui était la condition sine qua non pour conserver, voire accroître le groupe parlementaire élu en 2007. En l’absence d’accords, les candidats du Front de gauche ont été balayés par la vague rose, y compris dans les zones où il était traditionnellement bien implanté (en région parisienne notamment). La finalité politique du Front de gauche n’est peut-être pas d’avoir un maximum de sièges. Ceci dit, sauf à envisager une prise du pouvoir par la force ou croire au mythe du « recours à gauche », la force et l’influence politique d’un mouvement politique se mesure bien au nombre de ses élus.

On le voit, la gauche de transformation sociale en Europe se trouve à des stades de développement inégaux. Ces situations diverses s’expliquent par des contextes nationaux hétérogènes. Syriza en Grèce est aujourd’hui le premier parti de gauche, mais ce succès récent a été acquis dans des circonstances exceptionnelles. Dans d’autres pays, la gauche radicale est faible ou n’est qu’épisodiquement forte. Le cas français est à part. Depuis vingt ans, les Français sont le peuple européen qui a le plus résisté à l’offensive néolibérale. Dernièrement, l’opposition de masse à la réforme des retraites et la défaite électorale infligée à Sarkozy en sont la preuve. Le Front de gauche ne deviendra durablement une force majeure à gauche, que s’il s’arme d’une stratégie adéquate. En ce sens, l’unité des gauches contre la droite et l’extrême droite est prioritaire, car tout ce qui divise à gauche est rejeté par l’électorat de gauche. Toute surenchère rhétorique « gauchiste » ou enfermement sectaire est durement sanctionné par les électeurs de gauche comme l’a montré le cas du NPA. L’esprit unitaire n’exclut ni la défense d’un programme et d’une stratégie propre au Front de gauche, ni les échanges critiques avec le PS, bien au contraire. Ensuite au peuple de choisir la voie de gauche qui lui parait la plus crédible. Si ces conditions sont remplies, le Front de gauche n’est pas condamné à remplir éternellement le rôle d’aiguillon vis-à-vis du PS, mais pourrait devenir le centre de gravité de la gauche.

Que faire maintenant ? La structure fédérale du Front de gauche devrait être renforcée et officialisée afin de permettre aux milliers de personnes – notamment des jeunes - qui ne souhaitent adhérer à aucune des formations de ce cartel, de continuer à militer et à lutter au sein d’une structure. Par ailleurs, le Front de gauche devrait se concentrer sur un nombre limité de questions à fort contenu « social » : contre le pacte austéritaire en Europe, pour une politique de l’emploi et des services publics, pour une véritable revalorisation du Smic, pour une réforme fiscale ambitieuse, pour un pôle public financier, etc. Un travail pédagogique doit être également accompli pour convaincre de l’importance d’une rupture avec les institutions bonapartistes de la 5e république. L’idée de planification écologique doit également être approfondie. Ces mesures permettraient au Front de gauche de se distinguer de la présidence Hollande qui, déjà, est en train de décevoir sur ces dossiers majeurs.

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