REPUBLIQUE ET SOCIALISME
EN BRETAGNE
Juan Sarkofrance
On ne dira jamais assez le pathétique de ce Président allégé chaque fois qu’il ouvre la bouche pour parler Urbi et Orbi du poids de la France dans l’Europe, dans le monde et dans la galaxie. Et quelle pitié de voir des journalistes déguisés en laquais, atteints de la tremblante du mouton éjectable, contaminés par cette gravité d’opérette dans leur costume taillé bien chic, rehaussé d’une triste bavette ! La peur se lit sur leur visage quand ils doivent affronter le delirium minceur et rigueur de ce petit homme aux aguets, pédagogue pour les nuls.
Nicolas Sarkozy, c’est le moteur enrayé du capitalisme imbécile, la machine à découdre les vérités, à faire le point sur des tissus de mensonges, à broder sa propre légende dans ses palais malades, où il ne sait qu’inspirer la terreur par devant, et les rires par derrière. Cet homme-là ne sait faire qu’une chose : singer ! Sans doute une réminiscence de l’œuvre de son père, lorsque ce dernier, après la Légion Étrangère, vantait les machines « Singer »…
Singer la grandeur de la France, de l’Europe, singer le paternalisme, le protectionniste, singer la compassion pour les pauvres banquiers dont dépendent nos richesses de papier, pour le répugnant système des nantis et des cupides foulant au pied toute dignité et toute démocratie, singer le devoir, la peur pour nos finances, singer avec laideur l’exercice du pouvoir alors que le sien a ruiné la France en moins d’un quinquennat, alors qu’il désespère des millions de citoyens écrasés par l’austérité et la misère, singer l’écoute et la présence alors qu’il n’entend rien, ne voit rien, ne dit rien, comme les trois petits singes en un, trônant sur les télés.
Il n’y a rien en face des Français, la chaise est vide. C’est l’hologramme de l’Allemagne et des Capitalistes qui fait du sur mesure pour les ignorants. Même en cassant l’éducation, Sarkozy n’a pas compris que son manège de propagande tournait à présent dans le vide, que plus personne, hormis ses toupies et ses cancres, n’était dupe de ses grosses coutures au fil blanc cherchant à embobiner le bon télé-consommateur apeuré pour sa modeste épargne.
Rien n’a été sauvé, et surtout pas la France ! Sarkozy l’a humiliée pour préserver un pouvoir de façade, il s’est vautré comme Daladier au pied d’une Allemagne toute puissante, la seule vraie force économique de cette Europe de Monopoly trafiqué. On aurait dit un chiot jappant dans les cuisses de son maître, de sa maîtresse Angela en l’occurrence, la suppliant de lui laisser un os électoraliste à ronger.
Après l’avoir pris en marche, le voici, ce bonimenteur, qui descend du train de Bruxelles pour haranguer la foule sur les ondes, pour la rassurer avec des airs de sauveur providentiel, de vainqueur historique. Sa cour des miracles applaudit – les autres affligeants : Fillon, Copé, Baroin, Guéant et Morano, la pucelle d’Halloween –, les marchés font la fête pendant un jour ou deux, remuent la queue et les euros, histoire de spéculer encore avant l’effondrement, inévitable désormais, grâce au choix d’un Papandréou dépassé et soudain lucide de rendre le pouvoir à son Peuple !
Pathétique spectacle, oui, que celui de ce petit homme insensé, plein de tics, ministre de l’Intérieur à jamais comme Lang fut celui de la Culture, qui s’est pris pendant quelques heures pour le grand héros qu’il n’est pas, qu’il n’a jamais été et ne sera jamais.
Rien n’a été sauvé, nous le verrons aujourd’hui, demain et les jours qui viennent. La Troïka (UE, BCE, FMI) avait mis en place un plan technocratique à l’image des précédents – elle ne sait faire que ça –, mais en plus grand encore, en plus catastrophique, un plan qui ne servait qu’à gagner du temps, à préserver les façades qui lui rapportent tandis que les maisons des familles s’écroulent les unes après les autres.
Nicolas Sarkozy, dans son one-man show télévisuel en apesanteur, a rappelé à son bon peuple tout ce que la France avait réussi à sauvegarder jusqu’ici, oui jusqu’ici : les salaires, les retraites, l’emploi, la sécurité – ah, la sacro-sainte sécurité qui lui colle à la peau comme une vieille sueur ! –, et autres farandoles des desserts sociaux qui bientôt lui passeront sous le nez. Il a rappelé à quel point nous avions tenu bon, jusqu’ici, par rapport aux autres, afin de mieux préparer le terrain à l’austérité salvatrice qu’il rêve universelle, et qui fera le bonheur des banques, des clans et des spéculateurs, vivant et prospérant de la misère des gens.
Rien n’a été sauvé ! Les Grecs nous le rappellent avec une évidence sublime, celle du Peuple ! Ce plan nocturne factice, qui sera oublié très vite – référendum grec en février 2012 où le NON l’emportera, forcément – mais dont les stigmates resteront profonds, demain, dans quelques semaines, dans quelques mois au mieux, ce plan avorté va plonger la France, elle aussi, dans une crise fatale : d’abord gel des salaires, puis leur diminution drastique, allongement de la durée du travail sans contrepartie, augmentation des taxes, diminution des soins, services publics passés au kärscher, accès à l’Éducation et à la Culture réservé aux élites, hausse massive du chômage, envolée spectaculaire de la pauvreté, de la précarité, du surendettement et de l’insolvabilité des citoyens ordinaires, multiplication des actes désespérés. On va encourager les gens qui le peuvent encore à s’endetter, comme les états l’ont fait, pour sauver leurs apparences, un train de vie artificiel et irresponsable, ce qui est la meilleure façon de les censurer, de les tenir en laisse courte – comme les marchés tiennent la politique des états –, et de les forcer à accepter tous les compromis, toutes les rigueurs, tous les viols de l’identité, de la pensée critique, toutes les sodomies patronales, pour garder un minimum de salaire et de sécurité. Quelle imposture !
Grâce au Peuple grec, les choses sérieuses vont enfin pouvoir commencer, et le vraie Europe se construire dans le respect des Droits humains, et non dans l’infamie !
Il faut changer de société en toute intelligence, c’est notre dernière chance !
Christophe Leclaire
Une Europe qui a peur de ses peuples est-elle viable ? On pouvait se poser la question après les mépris manifestés vis-à-vis des votes français, néerlandais, puis irlandais, contre le traité constitutionnel européen. L’interrogation revient, encore plus forte, au vu de la panique suscitée sur l’ensemble du continent européen par l’annonce d’un referendum en Grèce.
On pourrait pourtant penser que rien n’est plus normal que de demander au peuple concerné d’avaliser des choix politiques aux conséquences aussi considérables que celles de l’accord de « sauvetage » financier parrainé par Berlin et paris. N’appartient-il pas aux citoyens grecs de décider si leur souveraineté doit désormais être soumise à contrôle extérieur, si la réaction des marchés est plus importante que la définition de leur niveau de vie ? Sachant que la politique qui doit être mise en œuvre n’a aucun rapport avec les engagements électoraux du parti socialiste grec, seul le peuple devrait, dans le respect des principes démocratiques, valider les mesures à prendre.
En fait, le processus qui a conduit à cet « accord européen » a tellement bafoué, étape après étape, toute idée de volonté populaire, qu’on en est arrivé à une situation impossible. Fallait-il que la Grèce soit membre du club de l’euro, c’est-à-dire in fine que son économie fonctionne à partir de critères adaptés à l’Allemagne ? Fallait-il en accepter les contraintes antisociales ? Fallait-il qu’un parti se disant socialiste les impose à rebours de la mission que lui avait confié ses électeurs ? De reniement de la démocratie en reniement de la démocratie, les dirigeants ont mis le pays au pied du mur. Il apparaît évident que la population, dans sa large majorité, ne veut plus accepter d’énormes sacrifices tout en restant dirigée par des instances, nationales autant qu’européennes, sur lesquelles elle n’a aucun contrôle réel. Ce soudain retour de la démocratie dans le jeu européen semble étonner les commentateurs habitués à laisser gouverner des « élites » de moins en moins éclairées. Berlin et Paris auraient bien fait l’économie de ce passage par la case « souveraineté populaire ». Les deux pays ont d’ailleurs immédiatement annoncé qu’ils souhaitaient, malgré tout, appliquer l’accord le plus vite possible. Les méthodes autoritaires qui président à la zone euro rendent la sortie de crise plus difficile à chaque étape.
Les Grecs posent donc, de façon évidente, la question du pouvoir politique et de sa légitimité à l’heure de la « gouvernance mondiale ». Ce système absurde qui, au nom de la préservation de dogmes économiques, veut maintenir la domination politique d’une classe dirigeante marginale et uniquement préoccupée par ses intérêts financiers, est aujourd’hui la cible des citoyens grecs. Le gouvernement de ce pays n’avait plus de légitimité et en tire les conséquences. Il appartient évidemment aux citoyens de redéfinir, de façon démocratique, les voies de sortie d’une crise qui ne fait que s’approfondir à leurs dépens depuis des années.
André Bellon
Président de l'association pour une constituante
Ancien Président de la Commission des Affaires Etrangères de l'Assemblée Nationale
Mercredi, 02 Novembre 2011 08:29
Le sommet européen du dimanche 23 octobre s'était terminé sans décision, les 27 chefs d'Etat et de gouvernement réunis à Bruxelles acceptant d'attendre la réunion de la commission budgétaire du Bundestag fixée au mercredi suivant. Alors que la spéculation se déchaînait contre les principales dettes publiques européennes, personne n'avait rien trouvé à redire à cette exigence de respect de la souveraineté nationale allemande. Sarkozy s'était même senti obligé de mimer son grand frère en recevant les présidents de groupes de notre Parlement croupion national, bien plus mal traité que le Bundestag sous la Cinquième République révisée traité de Lisbonne.
En revanche, l'annonce ce lundi de la convocation d'un referendum en Grèce a suscité des commentaires consternés parmi les dirigeants européens et précipité une chute des places boursières du monde entier. Les Grecs ne sont pas les Allemands. La souveraineté des prêteurs, fussent-ils étatiques, est protégée. Celle des pays débiteurs est explicitement limitée. La Grèce soumise à un contrôle de la Troïka qui s'alourdit de plan en plan, doit en contrepartie de son « sauvetage » renoncer à ses prérogatives souveraines.
Nous n'exagérions donc pas en parlant du coup d'état financier en cours au niveau européen ni du pouvoir totalitaire de la finance. La domination du capital financier est politique autant qu'économique. Des institutions sont mises en place qui organisent méthodiquement le dessaisissement des peuples. A leur sommet trône la Banque centrale « indépendante ». Vient ensuite le semestre européen qui assujettit les budgets nationaux au contrôle d'une Commission européenne également non élue. Puis la règle d'or que chaque Etat doit adopter au terme du dernier sommet européen. Avec un tel carcan on rêve de voir tant de commentateurs regretter qu'il n'y ait pas davantage de coordination des politiques européennes, au nom d'un fédéralisme qui ferait reposer toute l'intégration européenne sur des mécanismes anti-démocratiques d'où le peuple aura été exclu. Le referendum grec, manifestation incongrue de souveraineté populaire, survient alors comme le grain de sable qui menace la machine. Tout sera donc fait pour que Papandreou y renonce.
Mais si leurs réactions violemment hostiles au referendum confirment que les marchés financiers sont par nature hostiles à la démocratie, la décision de Papandreou montre aussi que le seuil de résistance aux politiques d'austérité a été atteint dans son pays. Là est la pire nouvelle pour la finance. Car s'il lui est possible de circonscrire un homme, et Papandreou a été jusqu'à présent son jouet docile, il est impossible de le faire des peuples qu'elle pressure. Ce referendum ne sort pas du néant. Il a été réclamé par une dizaine de grèves générales. L'échec cuisant des plans d'austérité successifs a mis la société grecque à feu et à sang. Papandreou ne peut donc résister plus longtemps. Il lui faut reprendre l'initiative. Sans doute pense-t-il obtenir plus facilement le soutien à un plan qui prévoit l'annulation de 50% de la dette des institutions financières. Mais tiendra-t-il jusque-là ? Sa majorité se disloque. Même son gouvernement lui échappe. Le ministre de l'économie prétend qu'il n'était pas informé. Vrai ou faux nous n'en saurons rien. La Troïka prépare déjà ses hommes de remplacement. Un gouvernement « d'union nationale » est envisagé pour renverser le pouvoir en place. Papandreou est prévenu. Quand on cède à la finance, on doit le faire complètement. Jusqu'ici il l'a fait. Mais quand on lui résiste, il faut le faire complètement aussi.
L'Elysée est consternée quand le peuple est consulté. Au contraire, je me réjouis que douze grèves générales aient contraint M.Papandréou à convoquer un référendum réclamé par le peuple.
Je forme le vœu que les Grecs disent non au plan européen de dix ans d'austérité qui plomberaient leur avenir. Ils imposeront ainsi aux dirigeants européens l'obligation de sauver le peuple autant que la monnaie.
La fête nationale grecque annonçait déjà le referendum
Panagiotis Grigoriou - Blogueur
Panagiotis Grigoriou, historien et ethnologue, revient sur la fête nationale grecque, vendredi, au cours de laquelle politiques et CRS ont été débordés par les manifestants. Un récit qui éclaire la décision de Georges Papandréou d'organiser un référendum.
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Quelle
parade ? Tonnerre de Zeus... Imaginez un 14 juillet où le Président de la République se fait conspuer par la foule qui envahit les Champs-Élysées, annulant la parade militaire et transformant
la commémoration officielle en manifestation en faveur de la libération du pays, tandis que les manifestants brulent le drapeau allemand, obligeant le Président au départ précipité. C'était
pourtant notre journée de fête nationale ce 28 Octobre, en résumé.
Karolos Papoulias, notre Président de la « République » (ancien Ministre P.S. du temps du père Papandreou) a passé un moment désagréable ce matin. Évacué d'urgence comme un grand
blessé de la route, il a aussitôt exprimé sa colère vis à vis des... manifestants.
Certes, c'est un Président, disons d'honneur et de parade car selon la Constitution, le pouvoir serait aux mains du Premier Ministre Georges Papandreou (Jeffrey pour les connaisseurs, d'où le
slogan « Jefry go home », certains grecs considèrent que le sweet home des Papandreou est plus près du New Jersey que de l'Acropole, étrange peuple vraiment ces grecs).
Ce dernier, a en tout cas pris soin, d'éviter les parades de la nation par les temps qui courent. Mais, décidément, être Président même d'honneur, d'un pays où la Res Publica la mieux partagée
est l'indignation et la colère des citoyens, cela devient désormais un honneur très risqué.
Les tenants du « Mosialisme » comme on dit ici (Ilias Mosialos est le porte parole du gouvernement P.S.) à travers les médias, ont souligné l'hybris commise sur la fonction et sur la
personne du Président, oubliant néanmoins la violation incessante et dans les faits, de la Constitution et de la souveraineté de notre ex-République (certes un peu « Mykonière »),
depuis l'arrivée du FMI, en réalité, depuis l'accélération des Traités de l'U.E., mais qui s'inquiétait vraiment du temps des déstructurants fonds structurels de Bruxelles, sauf que rien n'est
jamais gratis, surtout chez les Béotiens.
Dans la majorité de nos villes aujourd'hui, les parades et autres festivités nationales se sont transformées en violentes manifestations populaires. Dans nombreux cas, les tribunes officielles
ont pris l'allure de sièges éjectables, surtout pour les députes P.S. et les ministres qui pensaient encore poser pour le cadre nationale. Du jamais vu depuis l'occupation (de
1941).
Ici, dans cette ville entourée de montagnes et de rage, deux malheureux députés P.S. ont cru bon y passer outre. La foule a attaqué le podium officiel, un député (P.S.) a été violemment frappé à
la tête par un manifestant, les officiels ont été évacués à la hâte, ici aussi, le défilé a été annulé.
Lorsque la police a arrêté le manifestant, l'enfermant dans le car des MAT (les CRS du pays de Jupiter), les manifestants ont attaqué le véhicule en l'encerclant ; et la police a aussitôt libéré
le manifestant ne voulant plus envenimer la situation.
Les gradés de la police locale avaient pourtant suggéré aux politiques la modestie. Un de mes amis qui s'est approché pourtant trop près du service d'ordre, s'est fait fractionné un bras et il a
fini par soigner son indignation dans les urgences de l'hôpital. Je lui avais pourtant dit, trop près, trop vite, danger. A croire que même les Présidents n'y échappent plus. En somme, un vent
mauvais...
Retrouvez Panagiotis Grigoriou sur son blog.
Sarkozy: Papandreou achève le ratage français du G20
Mercredi 2 novembre,
Nicolas Sarkozy est retourné « travailler » après quasiment une semaine de repos. Ses jours de repos à la luxueuse résidence de la Lanterne ont été gâchés par l'annonce surprise d'un
référendum grec. Mardi, les Bourses s'effondraient partout, tirées vers le bas par les valeurs bancaires. En quelques heures, les faibles bénéfices du sommet européen de la semaine dernière
étaient effacés.
A l'Elysée, on croyait arriver à Cannes avec l'accord européen du 26 octobre comme unique et maigre trophée pour ce G20 cannois.
Peine perdue ! le fiasco sera total.
Sarko au
repos
Nous
ne savons plus quel « éditorialiste » professionnel avait repris à son compte l'une des critiques UMPistes contre François Hollande la semaine dernière. Le candidat socialiste s'était pris quelques jours de
congés, pour revenir réagir vendredi au monologue télévisuel de Nicolas Sarkozy de la veille. Certains avaient jugé bon de fustiger cette absence en pleine crise.
Rares ont été celles et ceux qui ont relevé que notre Monarque aussi était parti en vacances. Après sa dure semaine (dont un dimanche 23 octobre puis une quasi-nuit blanche le 26 au soir), on
dira qu'il avait bien droit à quelques journées de repos. D'autant plus que son épouse avait accouché depuis peu. Il fallait bien qu'il retrouve les « deux femmes de sa vie », comme le
titrait un magazine people.
Après tout, il n'est « que » président. Il a bien le droit à quelques journées de récupération comme n'importe quel salarié, n'est-ce-pas ? Sarkozy donc était en vacances depuis jeudi
soir, juste après son show télévisé. Aucun rendez-vous officiel n'encombrait son agenda de vendredi à mardi soir. Il a pris ses quartiers au château de la Lanterne, à Versailles, avec Carla et Giulia. On l'a photographié courant dans les allées.
Grèce, ou le retour du
peuple ?
La
semaine devait être courte, reprenant par une journée de préparation avant son fameux sommet du G8 et du G20 à Cannes. La cité festivalière a été inévitablement bouclée par quelques dizaines de
milliers de policiers et gendarmes. Mercredi, Sarkozy devait jouer au Monarque socialement concerné en recevant des ONG puis des représentants syndicaux du « Labour 20 » - L20, au Palais
de l'Elysée.
Mais ce scenario s'est planté. Lundi soir, il a suffit que le gouvernement grec annonce l'organisation d'un référendum sur le nouveau plan de sauvetage pour que les Bourses du
monde s'effondrent à nouveau dès le lendemain matin. Les peuples contre la Bourse ? A Paris, le CAC40 a chuté de 5,38%. La Société Générale perdait 16% en une séance.
Le sommet européen de la semaine dernière a eu un bien court effet. Et c'est tout le G20 cannois qui est menacé d'échec.
C'est la « panique en Europe ». Nicolas Sarkozy a réuni quelques proches en urgence à l'Elysée mardi vers 17h. Il était paraît-il «
consterné ». Personne à l'Elysée n'avait vu le coup venir. Un conseiller anonyme confiait au Figaro: «Hier, personne en
Europe n'a été prévenu de rien, et jamais les Grecs n'ont évoqué, même comme une vague possibilité, le risque d'un référendum la semaine dernière pendant les négociations à Bruxelles. »
Quelques minutes plus tard, un très court communiqué de la Présidence de la République annonçait la couleur: « Hier
le Premier ministre Grec a pris l'initiative d'annoncer un référendum. Cette annonce a surpris toute l'Europe.» Puis: « La France tient à rappeler que le plan adopté jeudi dernier à
l'unanimité par les 17 États de la zone euro est la seule voie possible pour résoudre le problème de la dette grecque. Donner la parole au peuple est toujours légitime mais la solidarité de tous
les pays de la zone euro ne saurait s'exercer sans que chacun consente aux efforts nécessaires.» Et pour conclure, Papandreou sera convoqué mercredi, en fin de journée, pour s'expliquer.
Présidence crédible ?
La Grèce ne recevra sans doute pas sa prochaine tranche de 8 milliards d'euros de prêts pour faire face à ses échéances de remboursement. Un défaut du pays menace. Jeudi dernier à la télévision,
Sarkozy qualifiait cette hypothèse de « catastrophe mondiale ».
« Si les Grecs n'en veulent pas, il ne sera pas adopté » avait déclaré le premier ministre grec Papandreou à propos de l'annulation de 50% de la dette grecque. Ce sera l'objet du
prochain référendum. En quelques phrases et une annonce, Papandreou ruinait l'un des arguments sarkozyens: et si la Grèce ne voulait pas de cette coûteuse solidarité de l'eurogroup ?
Pour l'heure, le G20 qui débute jeudi risque d'être la confirmation d'un gigantesque gâchis. Sarkozy n'avait nullement besoin de cet accident grec. Sa présidence du G20 n'avait de toute façon
servi à rien.
Que
retiendra-t-on de ces 12 mois écoulés de présidence française du G20 ?
Pas
grand chose. L'année a été perdue. Sarkozy a sillonné les campagnes françaises, davantage préoccupé par sa réélection que par le sort du monde. La crise des dettes souveraines européennes a
perturbé ses vacances et son story-telling. Trois ans après le krach boursier de l'automne 2008, la situation a objectivement empiré. Les marchés sont toujours aussi peu stables, aussi peu
régulés, aussi peu convaincus. Les paradis fiscaux ont changé de nom. Et les Etats quémandent, à coup de plans d'austérité, quelques milliers de milliards d'euros d'emprunts.
Finalement, la présidence française du G20 ne fut qu'un mauvais jeu de télé-réalité boursière, une sorte de « Koh-Lanta du Triple A » jusqu'au dernier jour.
Depuis un an, Sarkozy a beaucoup parlé, beaucoup discouru sur l'avenir du monde et « sa » vision. Mais que s'est-il réellement passé ? Rien. On sait bien que la tâche était immense. Mais
c'est toujours la même histoire. Notre Monarque agite ses bras, gonfle ses maigres muscles, surjoue le volontarisme et cache ensuite la faiblesse de ses résultats.
A-t-on besoin encore d'un président aussi vantard qu'inefficace, aussi peu crédible qu'agile ?
En janvier, il avait prononcé un vague et long discours de Grand Sauveur, au Palais de l'Elysée. Ses priorités étaient immenses, à la hauteur de la gravité de la situation:
(1) « La présidence française souhaite réformer le système monétaire international pour apporter des réponses collectives à ces dysfonctionnements et accompagner les mutations profondes que
connaît l'économie mondiale, avec notamment la montée en puissance des grands émergents ». Fichtre ! On allait promouvoir une gestion coopérative des réserves de change, relever les fonds propres de nos banques, mieux
coordonner les politiques macro-économiques des Etats. L'Europe à 27 n'y arrive même pas. La croissance mondiale s'est affaissée, on frôle la récession. Et les Etats, un à un, perdent leur fameux
Triple A.
(2) La présidence française devait « renforcer la régulation financière », par exemple en matière de régulation du « secteur bancaire fantôme » (activité bancaire parallèle non
régulée à ce jour) et « d'intégrité et de transparence des marchés financiers ». On sourit. En France, la régulation financière est restée
bien modeste, plus modeste qu'ailleurs.
(3) « La France souhaite trouver des solutions collectives pour réduire la volatilité excessive des prix des matières premières, notamment agricoles ». En juin dernier, la réunion des ministres de l'Agriculture se
clôturait sur un « plan
d'action » qui n'était en fait qu'une longue suite de déclarations d'intention réaffirmant les droits des uns et les devoirs des autres. Il y avait même la reconnaissance de «
l’importance du riz pour la sécurité alimentaire » (chapitre 17). Les 20 «encourageaient», « s'engageaient à promouvoir », «reconnaissaient », « soulignaient la nécessité », «
applaudissaient », « insistaient », etc. Fantastique ! Parmi les rares résultats concrets, les 20 décidèrent de créer le Système d’Information sur les Marchés Agricoles « pour
encourager les principaux acteurs des marchés agroalimentaires à partager leurs données » et de lancer «l’Initiative internationale de recherche pour l’amélioration du blé »,
un machin de coordination qui reliera différents programmes nationaux et internationaux de recherche.
(4) On se souvient, la crise
avait vu débouler sur nos écrans français un personnage aussi savoureux qu'inattendu: « Sarko le Gaucho », l'homme de la droit décomplexée qui s'emballait à l'étranger contre
le capitalisme mondialisé. Pour ce round du G20, Sarko-le-gaucho nous avait promis de faire « avancer 4 objectifs prioritaires dans ce domaine : l'emploi, notamment des jeunes et des plus
vulnérables ; la consolidation du socle de protection sociale ; le respect des droits sociaux et du travail ; et une meilleure cohérence des stratégies des organisations internationales ».
On attendait une sacrée rupture, la promesse d'une « nuit du 4 août
» de la fiscalité
mondiale, puisque les 20 plus grandes économies du monde étaient enfin réunis autour de leur survie collective et individuelle. Ce G20 de la dernière chance
devait s'accorder pour répondre aux Indignés. Las, les ministres du Travail du G20 se sont bien réunis fin septembre, pour rien. Qu'a-t-il été décidé contre l'injustice partage de la valeur
ajoutée, les cadeaux fiscaux aux fortunes internationales ? Rien. Mais les ministres du Travail et leurs hauts fonctionnaires ont beaucoup parlé, au cours d'une dizaine de réunions organisées par Xavier
Bertrand. Le 26 septembre dernier, Sarkozy a fait un discours où il se félicita des résultats obtenus: « le principe d'une
réunion ministérielle sur l'emploi lors de la prochaine présidence mexicaine » (sic!),« la création d'un groupe de travail intergouvernemental sur l'emploi des jeunes » (re-sic !),
et « la contribution très utile du groupe consultatif des Nations Unies sur le socle de protection sociale présidée par Madame Bachelet ». A l'issue de cette ultime réunion parisienne, les 20 ministres
listèrent leurs recommandations, pour le sommet final à Cannes, ces 3 et 4 novembre: conforter l'emploi comme une priorité de politique économique, préparer les jeunes à trouver des emplois
décents, soutenir l'intégration sociale et l'accès à l'emploi, renforcer la protection sociale, etc... Un verbiage incroyable, indécent, anachronique. Fallait-il en rire ou en pleurer ?
(5 ) Minée par des scandales nationaux (Woerth/Bettencourt, Karachigate, Bourgi) ou son soutien aux dictatures voisines (Egypte, Tunisie) avant d'opportuns retournements (Libye, Syrie), la
Présidence Sarkozy avait quand choisi d'afficher la lutte contre la corruption comme l'un de ses priorités du G20 de l'année: « l'action du G20 en matière de lutte contre la corruption
s'inscrit dans une stratégie globale de long terme en faveur d'un assainissement du climat des affaires, de la lutte contre l'évasion fiscale et du renforcement de l'État de droit ».
(6) Last but not least, Nicolas Sarkozy voulait « agir pour le développement». Le mois dernier, le projet d'une taxe sur les transactions financières internationales était
rejetée.
Sarkozy nous expliquait
pourtant que le G20 « apparaît aujourd'hui comme une enceinte pertinente pour apporter des solutions concrètes aux problématiques du développement » . Faute de résultats tangibles, la
moindre conférence bavarde est devenue un progrès de la régulation. Comme ce 28 octobre dernier, où Sarkozy expliqua, pas peu fier, que « le développement était autrefois un domaine qui ne
regardait que les vieilles puissances du G7. Ce temps-là est heureusement révolu, de même qu'est également révolue l'époque, pas si lointaine, où l'on pensait que l'économie européenne et les
autres grandes économies du monde, celle des Etats-Unis, et de la Chine, étaient indépendantes les unes des autres », lors d'une « conférence de la Présidence française du G20 sur le développement » rapidement oubliée.
Nicolas Sarkozy aura donc tout raté: la présidence française du G20 fut inutile, sans ambition, et perturbée dans ses derniers jours par ces soubresauts européens.
Ami sarkozyste, fais-tu encore confiance à ton mentor ?
juan Sarkofrance